Que celui qui prétend voir ce que moi j’ai vu quinze astres resplendir dans des points différents Qu’il imagine aussi ce char que notre ciel Qu’il imagine un cor avec son pavillon dessinant sur le ciel, de ses astres, deux signes et que, l’un se baignant dans les rayons de l’autre, Il pourra voir alors du vrai groupe d’étoiles car elle surpassait tout ce que nous savons, Là-haut, on ne chantait ni Bacchus ni Péan, La mesure finit du chant et de la danse, Le bienheureux silence à la fin fut rompu « Quand déjà, me dit-il, d’une paille broyée Tu penses que le sein d’où l’on tira la côte de même que celui qui, percé par la lance, autant qu’il est permis à l’humaine nature c’est pourquoi t’a surpris ce que j’ai dit plus haut, Mais ouvre maintenant les yeux à ma réponse : Ce qui n’a pas de mort et ce qui peut mourir, car le vivant éclat qui se diffuse ainsi grâce à sa qualité, rassemble les rayons Elle descend ensuite aux dernières puissances Or, quant à celle-ci, j’appelle de ce nom La cire n’était pas la même, dans ces astres, ce qui fait que parfois le même arbre produit Si la cire était prise à son meilleur moment mais la nature fait qu’il y manque toujours Mais si le chaud Amour trace et empreint lui-même C’est ainsi qu’autrefois il a créé la terre en sorte que j’admets ton premier point de vue, Or, si je m’arrêtais sans m’expliquer plus loin, Pour que te semble clair ce qui paraît obscur, J’ai parlé de façon que tu puisses comprendre et non pas pour connaître exactement le nombre ni si dare est primum motum esse non plus (174), Si j’ajoute ces mots à tout ce qui précède, Et si d’un oeil serein tu regardes surgi (176), Entends donc mes propos avec cette réserve : Et que ceci te soit toujours du plomb aux pieds, Il faut que celui-là soit un sot, et des grands, Il arrive, en effet, que l’on voit bien souvent Qui veut pêcher le vrai sans en connaître l’art Vous avez de cela des preuves évidentes comme Sabellius, Arius, et ces fous On doit bien se garder de trop précipiter car j’ai vu bien souvent quelque buisson paraître et j’ai vu le bateau glisser facilement Donc, que Madame Berthe et le sieur Martin (180), car ils peuvent, les deux, s’élever ou tomber. »
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166 - Rivière en Toscane. Il faut croire que son cours n’était pas rapide du temps du poète : c’est ce dont nous assurent les commentateurs. Même s’il avait été aussi rapide qu’aujourd’hui, cela ne compromettrait nullement la comparaison. 167 - Par saint Thomas d’Aquin. Il expliquera au poète son second doute ; cf. plus haut, notes 119 et 126. 168 - Dante pense qu’Adam, qui fut la création immédiate de Dieu, aussi bien que Jésus-Christ, dont le sacrifice rachète « l’avant » et « l’après » , et pèse plus que tout le poids des péchés des hommes, et qui est Dieu lui-même, eurent toute l’intelligence que l’on peut avoir ; ce qui contredit l’affirmation de Thomas, selon laquelle Salomon n’eut pas de second. Il faut ajouter que le nom de Salomon n’a pas été prononcé, et qu’aucun indice ne permet croire que le poète l’avait déjà reconnu. 169 - Dieu se voit et se conçoit lui-même à travers son Fils qui est le Verbe, et qu’il engendre par le moyen de l’amour, qui est le Saint-Esprit. Tout l’être et toute la création sont compris dans cette idée divine, qui est la source première de l’existence et l’archétype des êtres : elle se reflète et s’irradie dans les neuf choeurs d’anges et de là elle se différencie selon les cieux d’où elle repart, pour répondre à la variété de la création, tout en restant essentiellement une. pans cette descente progressive, l’idée divine perd de sa vigueur première et, d’atténuation en atténuation, elle en arrive à ne produire que de « brèves contingences » , c’est-à-dire des existences accidentelles et des objets corruptibles, dans lesquels l’ » essence idéale » brille de façon inégale. C’est ici une nouvelle exposition de la doctrine de Dante concernant l’inégalité et la diversité des êtres, thème qu’il avait déjà touché auparavant ; cf. Paradis, chant VIII. 170 - Adam et le Christ eurent le don d’intelligence au suprême degré. 171 - « Dieu apparut à Salomon une nuit, en songe, et lui dit : « Demande ce que tu voudras, et je te le donnerai. » Et Salomon répondit : « Donne à ton esclave un esprit clairvoyant, pour qu’il puisse juger ton peuple et distinguer le bien du mal. » (III Rois III : 5). 172 - Les quatre questions qui suivent embrassent la science telle qu’on la connaissait alors. La première appartient à la théologie, et prétend déterminer le nombre des anges ; cf. sur ce problème, Paradis, XXIX, 130-132, où il est dit que ce nombre est infini. 173 - Soit un syllogisme dont une prémisse est nécessaire et l’autre contingente : la conclusion sera-t-elle nécessaire ? c’est une question de logique. 174 - « S’il convient d’admettre qu’il existe moteur » , qui ne dépende pas d’un autre : conque : question de philosophie naturelle. 175 - Question de géométrie. 176 - Saint Thomas n’a pas dit que nul autre homme peut se comparer à Salomon, mais seulement que « nul second n’a surgi » . L’emploi de ce mot exclut donc l’idée que « nul second n’est né » , qui est l’interprétation qui s’offrait à l’esprit de Dante. Thomas voulait dire que nul autre roi ne s’est montré sur terre à la hauteur de la sagesse dont avait fait preuve Salomon. 177 - Si l’on ne cherche pas la vérité à tout prix, le risque de cette attitude est l’ignorance, qui n’est pas un péché -mais en la cherchant « sans en connaître l’art » , on risqué de tomber dans l’erreur et de se laisser séduire par le péché. 178 - Ce sont des philosophes grecs, qui avaient soutenu des vérités paradoxales, telles que la quadrature du cercle (Bryson), la génération par l’action du soleil (Parménide), l’incertitude de toutes choses (Mélissus). Aristote accusait déjà ces deux derniers de raisonner faussement, pour ne pas avoir appliqué les lois du syllogisme. 179 - Ce sont des hérésiarques, qui ont nié le dogme de la Trinité (Sabellius) ou l’éternité du Verbe (Arius). 180 - Noms très communs, cités comme exemples d’individus quelconques, qui ne se distinguent pas dans la masse. « Domina Berta » est citée comme prototype du vulgaire par Dante lui-même dans De vulgari eloquio, II, 6.
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Dante
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