Des belles voluptés la voix enchanteresse N'aurait point entraîné mon oisive jeunesse. Je n'aurais point en vers de délices trempés, Et de l'art des plaisirs mollement occupés, Plein des
douces fureurs d'un délire profane, Livré nue aux regards ma muse courtisane. J'aurais, jeune Romain, au sénat, aux combats, Usé pour la patrie et ma voix et mon bras; Et si du grand César l'invincible
génie A Pharsale eût fait vaincre enfin la tyrannie, J'aurais su, finissant comme j'avais vécu. Sur les bords africains, défait et non vaincu. Fils de la liberté, parmi ses funérailles, D'un poignard vertueux déchirer mes entrailles ! Et des pontifes saints les bancs religieux Verraient même aujourd'hui vingt sophistes pieux Prouver en longs discours appuyés de maximes Que toutes mes vertus
furent de nobles crimes, Que ma mort fut d'un lâche, et que le bras divin M'a gardé des tourmens qui n'auront point de fin.