Étienne de la Boétie (1530-1563)
Recueil : Vers françois - Sonnet

Ce jourd'huy du Soleil la chaleur alteree ...


 

Ce jourd'huy du Soleil la chaleur alteree
A jauny le long poil de la belle Ceres:
Ores il se retire; et nous gaignons le frais,
Ma Marguerite et moy, de la douce seree,

Nous traçons dans les bois quelque voye esgaree:
Amour marche devant, et nous marchons apres.
Si le vert ne nous plaist des espesses forests,
Nous descendons pour voir la couleur de la pree;

Nous vivons francs d'esmoy, et n'avons point soucy
Des Roys, ny de la cour, ny des villes aussi.
Ô Medoc, mon païs solitaire et sauvage,

Il n'est point de païs plus plaisant à mes yeux:
Tu es au bout du monde, et je t'en aime mieux;
Nous sçavons apres tous les malheurs de nostre aage.


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Ce jourd’hui, du soleil la chaleur altérée
A jauni le long poil de la belle Cérès ;
Ores, il se retire ; et nous gagnons le frais,
Ma Marguerite et moi, de la douce soirée.
 
Nous traçons dans les bois quelque voie égarée ;
Amour marche devant, et nous marchons après ;
Si le vert ne nous plaît des épaisses forêts,
Nous descendons pour voir la couleur de la prée.
 
Nous vivons francs d’émoi, et n’avons point souci
Des rois, ni de la cour, ni des villes aussi.
Ô Médoc, mon pays solitaire et sauvage,
 
Il n’est point de pays plus plaisant à mes yeux :
Tu es au bout du monde, et je t’en aime mieux :
Nous savons après tous les malheurs de notre âge.

 

 


Étienne de la Boétie

 

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