Il n'est point vray que pour aymer on meure, Car je serois ja mort et mis en terre, Si grand douleur en moy fait sa demeure ! Il n'est point vray qu'un amant puisse acquerre Bien ne repos pour peine qu'il endure, Car je serois en paix et non en guerre. Il n'est point vray que loyauté qui dure Se puisse veoir jamais récompensée; Puisqu'Elle m'est encore estrange et dure. Il n'est point vray qu'en dict et en pensée On doive plus d'amie avoir fiance; Car la mienne a sa foy trop offensée. Il n'est point vray qu'il soit en la puissance De mon malheur et fortune ennemie De m'eslongner de son obéissance; Il n'est point vray que jamais autre amie Puisse en mon cœur loger n'y trouver place: Loyauté n'est en moy si endormie; Mais il est vray que qui a veu sa face Ne peut avoir que de mourir l'attente. Bien-heureux est qui du mal se contente; Mais plus heureux qui a sa bonne grâce ! Faict par celuy qui voudroit encor d'âge Plus qu'un Nestor régner ou environ, En ta santé avoir bon aviron Tant qu'Atropos tard tranche le cordage.
|
Mellin de Saint-Gelais
Poèmes de Mellin de Saint-Gelais |