Antoine de Bertin (1752-1790)
Recueil: Les Amours (1780) - Livre III

C’est assez d’une faible lyre ...


 

C’est assez d’une faible lyre
Tirer de timides accords ;
C’est assez du dieu qui m’inspire
Dans de frivoles jeux dissiper les trésors.
Rentrez sous vos riants ombrages,
Doux enfants de la Paix, voluptueux amours ;
Cachez-vous. La Discorde a troublé nos rivages ;
Le soldat jusqu’aux cieux pousse des cris sauvages,
Et j’entends battre les tambours.
Quel demi-dieu, chéri des Filles de mémoire,
Arraché tout sanglant aux assauts meurtriers,
S’avance au bruit pompeux des instruments guerriers ?
C’est Achille ou d’Estaing, qui, courbé sous sa gloire,
Descend à pas tardifs de son char de victoire,
Et pare un jeune roi de ses doubles lauriers.
Levons-nous, il est temps : qu’on apporte mes armes ;
D’un large bouclier chargez mon faible bras.
Oui, j’abjure, ô Vénus ! tes honteuses alarmes ;
Amour, perfide Amour, je renonce à tes charmes.
C’en est fait : l’honneur parle, et je vole aux combats.

 

 


Antoine de Bertin

 

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